vendredi 8 octobre 2010

La chicha au manioc, boisson des Jivaros


La chicha est une boisson connue, renommée et bue dans de multiples contrées latino-américaines. Abordons la avec les considérations dues.

Ici, en France, point de chicha. Point de Jivaros non plus, et tant mieux pour eux.

Je ne peux le retenir plus longtemps, je lache le morceau : la chicha est une boisson fermentée au manioc.
Dit comme cela, la description paraît presque anodine.
N'importe quel novice de la boisson fermentée au manioc se dit : le manioc est une plante de là-bas, inconnue ici par les mangeurs de saucisson. Pourquoi n'en feraient-ils pas une boisson ? Nous, nous fabriquons bien de l'alcool à base d'orge et certains avec de la pomme de terre. 

Rapide leçon agronomique & géoculturelle avant d'en savoir plus sur la chicha :
-Le manioc est un arbrisseau des régions tropicales de la famille des euphorbiacées. C'est la racine qui se consomme, travaillé en fécule, farine, ou en tant que racine.
-Pas de robinet d'eau potable chez les jivaros, pas de robinet tout court, à peine quelques puits, vides pour la plupart en août, saison sèche. La seule eau permettant de préparer plats et boissons vient souvent de rivières troubles.
-L'eau ne se consomme pas en tant que tel, ou très peu.
-La seule boisson consommée par les jivaros dans la zone que j'ai visitée (Amazonie Equatorienne) est la chicha.

Je reviens à ma chicha.

En langue achuar (c'est dans une communauté Achuar que j'ai passé un peu de temps, les Achuars appartiennent au groupe de Jivaros. Mais cela, Philippe Descola le dit bien mieux que moi dans son ouvrage Les Lances du Crépuscule.), chicha se dit Nijiamanch.

Elle est préparée par la femme, et surtout consommée par l'homme, qui en boit régulièrement d'abondantes quantités dans un récipient en terre cuite nommée en langue Achuar pininkia
La chicha est préparée à base de manioc cuit et écrasé, d'eau non purifiée, et … de salive. Evidemment, la présentation de la recette est assez abrupte, c'est pourtant la réalité. Mais quoi de mieux que la salive pour purifier l'eau ainsi bue et acceptée par tous ?
La femme, assise devant un grand chaudron, mastique inlassablement de gros morceaux de manioc cuit, puis recrache le tout à grands jets dans le grand chaudron. Avec un long morceau de bois servant de spatule, elle mélange, elle mélange, jusqu'à ce que la chicha prenne une texture homogène et bien liquide.

Vous ne me croirez peut-être pas, mais c'est plutôt bon. Notez aussi que la qualité de la chicha varie fortement en fonction de la femme qui l'a préparée.
Evidemment, passé le litre, nos estomacs peu accoutumés à ce genre de breuvage accusent un peu le coup.

La recette est imprécise, mais je pense qu'aucun lecteur ne m'en tiendra rigueur...

Surtout un grand merci à la femme de Wajari qui m'a permis de la regarder préparer la chicha et qui a su épargner mon estomac en ne m'en offrant pas systématiquement.

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